Dimanche 8 mai 7 08 /05 /Mai 14:47

Depuis une demi-heure il me suit. Au magasin de presse après le cinéma j'ai regardé un peu trop longtemps la couverture du magazine gay, peut-être une seconde de trop. En relevant les yeux j'ai croisé son regard et en un éclair j'ai deviné qu'il avait compris.

J'ai détourné la tête tout de suite. J'ai rougi je crois. J'ai balbutié quelques mots à la caissière pour acheter des timbres. Elle n'a pas compris et m'a fait répéter. Elle s'est étonnée :

— Des timbres ? A une heure du matin ?!

— Oui madame, que j’ai fait, s'il vous plaît, ai-je rajouté.

Je sentais la file d'attente dans mon dos ricaner doucement de ma gêne. La meute est impitoyable. Lui, deux places derrière moi, ne devait pas en perdre une miette.

A ce moment une autre caissière est arrivée et a ouvert une deuxième caisse. Il s'est avancé d'un pas et a demandé une boîte de cigarillos et le journal du soir. Il était là, juste à côté de moi, pendant qu'on me remettait ma monnaie. Gros, pas très grand, la barbe et les cheveux châtains très drus, la cinquantaine ou un peu plus, les manches de sa chemise roulées, un petit sac à dos dans une main. Il paraissait ne même pas me voir. J'étais de plus en plus gêné, à la fois ému, énervé, excité un peu et pas mal apeuré. Je n'arrivais pas à remettre mes pièces dans le porte-monnaie, ma main tremblait… Quelques trop longues secondes plus tard j'ai pu le mettre dans ma poche tandis que la caissière impatiente me demandait de m'écarter pour laisser passer le client suivant. Ce que je fis avec un sourire pour m'excuser. C'est ainsi que je lui suis rentré dedans sans le vouloir. Je me suis retrouvé contre son gros corps. Il a fait semblant de se dégager en me bloquant contre la cloison, tandis qu'à l'insu de tous à travers la petite toile de mon short, sa main trouvait ma bite immédiatement et me palpait : je bandais déjà, il s'en est aperçu.

— Et bien, faites attention jeune homme, dit-il en se dégageant. Vous pourriez faire mal à quelqu'un.

— Pardon, m'sieur, je m'excuse, ai-je répondu automatiquement, sonné de l'audace de l'homme.

Puis je suis sorti. Et depuis il me suit...

J'ai marché un peu le long de la ligne de tram avant de m'en rendre compte. Je bandais comme un âne. Depuis que j'avais découvert mon attirance pour les garçons, que j'ai toujours pris grand soin de cacher, j'avais bien souvent rêvé d'un homme viril qui me trouverait beau et me désirerait. Mais pas comme ça, pas celui-ci, pas aussi vieux ni aussi velu, pas des conditions de rencontre aussi désarmantes. N'empêche qu'il me faisait bander, que je commençais à le désirer, à le vouloir... Avant de traverser la ligne de tram j'ai regardé machinalement de chaque côté. C'est là que je l'ai vu, à quinze pas derrière moi, marchant tranquillement les mains dans les poches, un petit cigare aux lèvres et le journal sous le bras. Je suis resté stupéfait deux à trois secondes. Je me suis senti débander instantanément.

La distance est longue entre un fantasme de petit ado puceau que je suis et découvrir qu'un gros pervers vous suit la nuit dans les rues que les derniers passants désertent. J'ai vu en face quelques personnes patienter à l'arrêt de tram. J'y suis allé me réfugier, calmement, en me disant que là au moins il ne pourrait rien me faire, tout en sentant une peur sourde pointer dans mon ventre. Le plus naturellement du monde il est venu, a pris un ticket au distributeur et s'est assis sur un des bancs pour lire son journal. Il ne m'a même pas regardé.

Quatre personnes attendent avec nous : trois garçons et une fille. A ce que je comprends, ce sont des étudiants qui travaillent au fast-food du centre-ville. Leur service fini ils rentrent chez eux. Ils semblent plus lassés que fêtards mais leur présence me protège. Je ne suis pas seul. La peur me tient le ventre : c'est une sensation bizarre, forte, nouvelle. Rien à voir avec les petites peurs de rien du tout que chacun a pu connaître dans son enfance. Non, c'est quelque chose de viscéral, animal, dangereux, quelque chose qui vous empoigne le bas-ventre. Étrangement ça me plaît assez. Je veux jouer avec…

Le quatuor d'étudiants est un bouclier formidable, il ne peut rien m'arriver. Je peux défier la concupiscence du vieux comme quand je marchais sur le bord du trottoir, m'imaginant longer un profond ravin, lorsque j'étais enfant. Je savais bien qu'aucun ravin ne se trouvait à côté de moi. Je me baisse et refais mes lacets, le gauche puis le droit. Ce faisant je lève mon postérieur un soupçon plus haut que nécessaire, je le présente au vicieux à moins de deux mètres de moi. Je lui tends mon cul, mes fesses, mon petit trou, ma rondelle. Je sens qu'il me veut, je l'entends presque arrêter de respirer, contempler mon arrière-train et contenir ses mains, les empêcher d'arracher mon short et mon slip pour me prendre là, dans la rue, comme une catin trop tentante ! J'en aurais presque envie également… La peur grimpe délicieusement, c'est un cancer sucré à la fois savoureux et mortel. Je la sens désormais picoter mon dos, elle me chatouille depuis les fesses jusqu'au bas des omoplates. Je me relève, regarde l'heure sur mon téléphone tout en surveillant sa réaction du coin de l’œil : il a replié son journal comme de rien. C'est pour moi une petite victoire : je sais qu'il me mate, je l'excite, je le fais bander.

Je le dépasse et contourne le groupe d'étudiants qui ne se rend compte de rien et continue sa discussion. Je regarde le plan et les horaires affichés comme si je voulais y chercher un renseignement. Il me voit de profil, seule la fille du groupe nous sépare. J'incline ma tête légèrement en arrière en regardant le haut de la carte. Ce faisant je pousse le bassin en avant et je sais que la bosse de mon sexe est bien visible. Une nouvelle érection commence, d'autant plus forte que de sa place il ne peut rien manquer du spectacle. Elle me surprend presque par sa violence et sa soudaineté. La sensation est si intense et si nouvelle que j'ai bien du mal à ne pas gémir. Je me mords la lèvre.

Le dernier tramway arrive, quelques rares personnes s'y trouvent déjà. Nous montons tous les six. Les étudiants s'assoient dans un carré et papotent, lui prend place sur un siège isolé au bout de la rame. Je repère un siège qui lui fait face à deux mètres et m'y loge. Je fais semblant de regarder dehors tout en plaçant mes mains à plat de chaque côté de mon bassin. Le geste serait tout naturel s'il n'avait pour effet de plaquer le tissu de mon short sur ma bite et mettre en valeur une bandaison formidable. Sans même le regarder je lui présente mon sexe dressé en haut de mes cuisses entrouvertes, en public, avec l'attitude de sainte nitouche d'un garçon sage. J'en frémis à la fois de ravissement et de frayeur. Je ne bouge pas d'un cil mais j'ai du mal à respirer : jamais je n'ai été aussi excité !

Trois arrêts plus tard je descends devant la gare SNCF. Je me suis levé de mon siège au dernier moment pour ne pas le laisser anticiper. Surpris, il sort de la rame en catastrophe, bloquant de force avec son bras les portes qui se refermaient. Une fois dehors je le toise d'un air narquois tandis qu'il roule son journal puis le range dans son sac à dos. Je suis en short et t-shirt, espadrilles aux pieds et je sais ce que je vaux à la course. Je voudrais qu'il essaie de m'attraper pour le garder derrière à la distance que je veux, mais il brosse la poussière de son pantalon du plat de la main, sans s'occuper de moi. Agacé je démarre au grand trot et lui passe au ras, je traverse la ligne et grimpe la rue du lycée, le long du mur du Jardin des Plantes, toujours en courant. Parvenu à la moitié de la rue, à peine essoufflé, je m'arrête et me retourne. Personne ne me suit, la rue est déserte. Je suis déçu, peiné, presque choqué de ce lâche abandon. J'imaginais ses ahanements derrière moi, sa course de mâle en rut à la poursuite de son plaisir. Je n'ai que la triste réalité du vide. Je redescends doucement, en guettant un signe, désirant l'éclair furtif d'une silhouette qui se cache pour mieux m'approcher. Mais non, rien ni personne...

Je remonte tristement, il est temps de rentrer dormir. En face de l'entrée du lycée se trouve une petite porte dans le mur du jardin. Le mur est épais et le renfoncement profond, je m'y réfugie, j'ai envie de me branler là avant de rentrer chez mes parents, histoire de noyer ma déception. Bien caché dans la pénombre je défais le premier bouton de ma culotte et y descends la main. Tout de même, et si quelqu'un me voyait ? Je me reculotte, l'excitation retombe, ne reste que la fatigue.

C'est alors qu'il survient par l'autre côté.

Il a eu l'instinct du chasseur. Il ne m'a pas suivi, me sachant trop rapide. Il a deviné que je voulais l'attendre et a contourné le Jardin des Plantes pour me prendre à revers. Avec un peu de chance… Pari gagné pour lui !

D'un seul coup son corps envahit mon petit espace. Il me pousse dans le coin entre la porte et le mur et se colle à moi. Une de ses mains fourrage vers mon sexe, ouvre mon short et plonge dans mon slip, attrape mon sexe et me le malaxe durement, couilles comprises. De son autre main il me prend la nuque et me maintient tandis qu'il m'embrasse. Son haleine est ignoble, ça pue le mauvais tabac, il m'empêche de respirer, sa langue cherche la mienne, sa main m'écrase les couilles, je serais plié en deux de douleur s'il ne me tenait pas coincé là. Sa barbe est rugueuse, c'est du papier de verre frotté sur mon visage. J'essaie de crier, sa bouche m'empêche de sortir plus qu'un pauvre son. Il semble se reculer puis d'un grand coup de son gros ventre dur dans le mien il me casse les abdos. Je n'ai plus de force, j'ai horriblement mal au ventre, je ne tiens debout que parce qu'il m'empêche de tomber.

— Alors ma petite salope, comme ça on agace les messieurs ? dit-il en se reculant d'un pas.

Je tombe par terre, je me tiens les côtes, je tousse et je pleure, je ne peux pas parler. Après vingt secondes comme ça il me soulève par les aisselles comme une poupée de chiffon et me colle contre la porte.

— Arrête de chialer comme une madeleine ! Ce que je t'ai fait c'est rien, dans cinq minutes tu ne le sentiras plus. Alors t'es qui, t'es quoi, tu veux quoi ? T'as quel âge, d'abord ? A vue de nez, t'as pas vingt ans, t'es un petit puceau qui s'enfile les bougies dans le cul le soir quand papa et maman sont de sortie en rêvant du grand jour avec un mec qui te la mettra ? C'est ça, hein, hein dis que c'est ça ? Hein dis que j'ai raison ?

Tout en pleurant j'opine de la tête. Je ne peux plus penser, je ne suis plus maître de moi, j'ai mal, je peux à peine respirer. Je l'entends fourrager dans le métal de la porte qui s'ouvre. Il me prend d'une main sous un bras et, moitié portant moitié traînant, me tire à l'intérieur du parc comme une poupée de chiffon. Deux boutons de mon short sont défaits. Je le sens qui glisse avec mon slip sur mes cuisses. Je le rattrape au dernier moment avec ma main libre. Il me laisse tomber sur le gravier de l'allée pendant qu'il retourne fermer la porte. Je dois avoir une drôle de touche, prostré par terre, le cul découvert, chialant comme un veau quand je ne tousse pas.

 

— Je sais ce que tu es. T'es un petit mec qui veut qu'on le prenne, un petit pédé en chaleur qui cherche la bite. T'inquiètes pas petit chat, j'en ai vu d'autres avant toi des lycéens le cul en manque qu'on empale sur la première pine venue. Tu ne vas pas être déçu. Enlève ton froc.

Par Krampack - Publié dans : L'histoire de la semaine
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